La question du maintien du travail (et de l’inaptitude éventuelle) concerne les salariés qui éprouvent des difficultés à tenir leur emploi pour des raisons de santé, soit parce qu’ils sont déjà reconnus travailleurs handicapés, soit parce qu’ils le deviennent.
En effet, les personnes qui risquent d'être déclarées, ou sont déclarées inaptes à leur poste, peuvent être menacées d’un licenciement.
Or, il existe des solutions et des aides possibles avant d’en arriver à cette extrémité, comme le fait d’aménager et adapter la situation de travail.
Ceci étant, l’entreprise ne dispose pas de toutes les ressources nécessaires à une prise en compte globale de la situation de la personne. Et un appui extérieur peut être nécessaire, notamment pour faciliter la reconnaissance du handicap au travail d’un salarié.
Par ailleurs, lorsqu’on est reconnu handicapé pour un trouble psychique, on ne souhaite pas forcément donner des détails sur la nature de son handicap, ou si on le fait (ou se sent obligé de le faire…), on peut choisir d’évoquer de manière vague une maladie chronique, ou bien parler de dépression s’il s’agit d’une schizophrénie (terme moins stigmatisant), etc. car on sait qu’il existe beaucoup de préjugés à propos des troubles psychique, et que les regards qu’un employeur et des collègues peuvent porter sur vous pourraient être biaisés.
D’où aussi la difficulté à ce que sa situation, dans toute sa singularité et parfois complexité, soit bien prise en compte.
Pour autant, il ne faut surtout pas vous isoler, et attendre trop pour parler de vos difficultés, au risque de voir les choses s’aggraver. Accepter de se faire aider pour rechercher une solution est la meilleure décision à prendre. Encore faut-il s’adresser au bon interlocuteur.
Mais avant d’en arriver à ce stade, il faut déjà apprendre à être attentif à ses signaux d’alerte.
Cela peut commencer par un simple sentiment de fatigue, qu’on espère éliminer par l’arrivée de quelques jours de repos, mais qui s’incruste, juste qu’à provoquer parfois un sentiment d’épuisement.
A cela peuvent s’ajouter des difficultés de concentration, de mémorisation, de l’irritabilité, des problèmes de sommeil, voire une ultra sensibilité qui peut donner envie de pleurer pour tout et rien.
Pour certains peuvent se rajouter un sentiment de méfiance, voire de parano, vis-à-vis des autres, qui les pousse à mal interpréter certaines situations, et à s'isoler de fait de plus en plus.
Cette impression de perdre le contrôle, d’être au bord de l’implosion, sont autant de symptômes qu’il faut savoir prendre en compte en temps voulu.
Or, il est fréquent que les personnes reconnues handicapées aient souvent du mal à évaluer la gravité de la situation, elles ont peu de points de repère et ont tendance à se juger sévèrement. Elles résistent ainsi à l’idée de consulter, voire pire encore à l’idée d’être arrêtées, et peuvent être dans le déni de la situation, par crainte d’être perçues par les autres comme plus faibles du fait de leur handicap. Elles peuvent éviter d’en parler à leur médecin traitant et/ou à leur psychiatre et/ou au médecin du travail, et refuser de prendre éventuellement un arrêt maladie qui s’avère pourtant nécessaire, notamment lorsque les symptômes deviennent de plus en plus invalidants.
Il a été démontré en effet que les problèmes de santé mentale généraient très souvent une forte résistance en milieu de travail en raison des préjugés qui y sont associés. Les personnes concernées repoussent l’idée même de la maladie, la refuse et ce n’est souvent qu’in extremis qu’elles acceptent de consulter.
Le soutien des collègues et du supérieur, quand ils sont au courant, peut être un déterminant crucial pour aider la personne à consulter et à s’engager dans un processus thérapeutique. Les proches sont aussi des acteurs qui peuvent jouer un rôle important pour aider la personne à mesurer l’importance de sa détresse et la pousser à recourir à une aide externe.
Premier interlocuteur à contacter, le médecin du travail qui va établir un diagnostic précis de votre situation.
Rappelons déjà qu’il est soumis au secret médical et n’a pas le droit de transmettre ces informations à l’employeur ou d’autres personnes de l’entreprise.
Néanmoins, c’est lui qui peut adresser à votre employeur, avec votre accord, des préconisations en fonction de vos capacités et éventuelles restrictions.
De plus, il est le seul habilité à prononcer un avis d’inaptitude ou de restriction d’aptitude.
Si vous êtes en arrêt maladie et que vous n’avez pas eu le temps (ou le réflexe) de prendre contact avec lui, pensez à demander une visite de pré-reprise où vous pourrez discuter de votre situation.
Avec lui, vous pourrez aborder tous les points qui vous inquiètent : « Quelles sont les incidences réelles de votre état de santé sur votre travail ? » - « Vos difficultés portent-elles sur quelques tâches ou sur l’ensemble de votre poste ? » - « La situation risque t-elle d'être provisoire ou durable ? » - « Risque-t-elle éventuellement de s’aggraver ? » - « Quelles seraient mes possibilités pour l’avenir ? » - « Pourrais-je conserver mon poste de travail, moyennant d’éventuels aménagements ? »…
Par ailleurs, en étant bien informé, le médecin du travail peut assurer une forme de veille : en cas d’interruption du traitement par exemple, il peut décider d’une inaptitude temporaire afin de vous soustraire à l’entreprise pour que vous puissiez prendre le temps de vous soigner à nouveau.
Il peut aussi demander, toujours en accord avec vous, un aménagement de poste, appuyer par exemple une demande de télétravail, limiter les déplacements ou les contre-indiquer transitoirement, Etc.
Il peut appuyer une demande d‘invalidité première catégorie, auprès du médecin conseil, s’il semble qu’un travail à temps partiel dans le cadre de l’invalidité serait mieux toléré pour vous…
Le médecin du travail peut également informer de certains dispositifs : par exemple le réseau « Eutelmed » (ex « Tele psy ») qui permet de mettre en relation un salarié en mission à l’étranger avec un psychiatre en cas de trouble psychiatrique aigu.
Rappelons que l’objectif des médecins du travail est de préserver la santé des salariés, et de favoriser leur maintien dans l’emploi. Rappelons aussi qu’une personne ayant un trouble psychique et qui est déclarée inapte à un poste de travail peut saisir l’inspecteur du travail pour contester cet avis d’inaptitude si elle le souhaite.
Mais être arrêté est parfois l’étape indispensable pour gérer la situation. Et ce, même sans avoir eu le temps de voir le médecin du travail.
Lorsqu’on est en arrêt maladie, on ne souhaite pas forcément exposer les raisons de son absence, notamment lorsqu’il s’agit d’un problème de santé psychique…
D’ailleurs, le médecin qui rédige l’arrêt de travail ne porte aucune information à caractère médicale sur celui-ci. Certains assurés préfèrent même demander au médecin traitant (s’il est généraliste) de réaliser l’arrêt de travail, et non au psychiatre, puisque le nom et la spécialité du médecin apparaissent sur l’arrêt de travail et peuvent alors orienter sur une pathologie psychiatrique.
Le retour au travail à la suite d’un problème de santé mentale est une étape cruciale à franchir et souvent marquée par un sentiment de vulnérabilité et par la crainte d’une rechute.
Aussi, le retour au travail ne se fait souvent pas à l’issue d’un recouvrement complet de la santé, mais plutôt à travers un processus continu où, peu à peu, la santé se reconstruit au sein même de l’activité de travail.
Les possibilités de revenir progressivement dans l'entreprise, d’apporter des changements aux conditions ayant contribué au retrait et de bénéficier du soutien de ses collègues et de ses supérieurs sont parmi les facteurs qui favorisent un retour au travail réussi et le maintien en emploi.
Reprendre confiance en ses capacités professionnelles, sentir que l’on est apprécié, retrouver le plaisir de travailler et de développer des perspectives d’avenir sont quelques-unes des expériences positives qui marquent un retour au travail réussi.
Qui plus est, apporter des changements dans le travail, notamment, agir sur les facteurs de l’environnement de travail qui ont contribué à la détérioration de l’état de santé et à l’arrêt maladie demeure la pratique la plus prometteuse pour soutenir le retour au travail et le maintien en emploi.
Lors de cette reprise, il faut aussi prévoir une visite médicale de pré-reprise. En effet, comme expliqué plus haut, le médecin du travail est l’interlocuteur incontournable pour faire face à une problématique de maintien dans l’emploi.
Les SAMETH (Services d’Appui au Maintien dans l’Emploi des Travailleurs Handicapés) sont subventionnés par l'Agefiph et le FIPHFP.
Ce sont des services extérieurs à l’entreprise qui peuvent faciliter les liens utiles entre le salarié, les services médicosociaux externes et le médecin psychiatre.
Le conseiller SAMETH sert aussi à mobiliser des aides. Comme la mise en place d’une formation, si l’adaptation du poste passe par de nouvelles compétences à acquérir et/ou d’un bilan de compétence ou bilan personnel pour aider à une nouvelle orientation.
Il analysera avec vous votre situation, vous aidera à faire le point sur vos besoins, identifiera et mobilisera les aides de droit commun et/ou les prestations de l'Agefiph (ou du FIPHFP) les mieux adaptées à votre situation pour vous permettre d’être maintenu dans votre poste.
L’aménagement d’un poste de travail peut se faire sous des formes très différentes, et ne pas concerner uniquement les personnes ayant un handicap physique.
Cela peut consister en un aménagement de l’organisation du travail : des aménagements concernant le temps, la durée, le rythme du travail… - le passage à un temps partiel - la prise en compte des conséquences du handicap (fatigabilité, effets secondaires du traitement…), etc.
A l’intérieur de l’entreprise elle-même, un accompagnement peut être utile en tant que soutien pour le salarié lui-même mais aussi en tant que médiateur avec l’entreprise. On peut pour cela faire appel à différents professionnels : médecin du travail, assistante sociale, organisations syndicales. On peut également faire appel à un tuteur à l’intérieur de l’entreprise.
Le handicap psychique nécessite, en termes de compensation, un accompagnement humain personnalisé qui permet d’effectuer les liens entre le travail, le soin et la vie sociale hors de l’entreprise.
Le tuteur qui sera désigné (et préalablement formé), pourra vous aider à adapter au mieux votre environnement de travail, et ce, en lien avec votre responsable hiérarchique.
Il pourra également : organiser la progression de l’intégration au poste de travail en tenant compte de votre rythme propre et des spécificités de votre handicap psychique – vous accompagner de façon permanente tout au long de votre parcours professionnel au sein de l’entreprise - contribuer à l’évaluation de manière objective, à l’aide d’un outil spécifique, de vos acquis professionnels.
En interne, le tuteur peut se mettre en lien avec la médecine du travail, le CHSCT, la Direction des Ressources Humaines, le responsable de l’accord handicap ou le chargé de mission handicap (s’il existe).
En externe avec des appuis ressources spécialisés, comme par exemple le référent qui vous accompagné dans votre placement au sein de l’entreprise.
Les services sociaux de votre organisme d’assurance maladie : si vous êtes en arrêt de travail ou en invalidité, ils peuvent vous aider à résoudre certaines difficultés immédiates liées à votre situation.