En cas d'expulsion

 

Si vous êtes menacé d’expulsion, ouvrir un dossier de surendettement peut être une solution. Lorsqu’elle a jugé votre dossier recevable, la commission de surendettement peut demander au juge de suspendre la procédure d’expulsion.

 

Les cas possibles de procédure d’expulsion

 

Le propriétaire veut vous expulser et vous refusez de partir.

 

Attention, seuls trois motifs permettent de demander votre expulsion : le propriétaire souhaite reprendre le logement pour le vendre (« congé pour vente ») - le propriétaire souhaite reprendre le logement pour y habiter ou pour y faire habiter un membre de sa famille (« congé reprise ») - le propriétaire doit justifier d’un motif grave (« congé pour motif légitime et sérieux »).

 

Ces motifs, sont le plus souvent : défaut de paiement des loyers, des charges ou du dépôt de garantie de votre part - défaut de souscription à une assurance habitation - existence de condamnation(s) pour troubles de voisinage : nuisances (bruits, odeurs, saleté,…).

 

Remarque, même en cas d’occupation illégitime des lieux (squat, campements), tout ce qui suit reste valable.

 

Que pouvez-vous faire dans un premier temps ?

 

Si vous avez des difficultés financières, n’hésitez pas à en parler à votre propriétaire : vous pouvez essayer de trouver directement un arrangement amiable (sans passer par les tribunaux) avec lui. Vous pouvez proposer un plan de remboursement par écrit au propriétaire. Les courriers doivent être recommandés car il est impératif de garder une preuve écrite pour formaliser un éventuel accord amiable.

 

Faites un demande de relogement avec la procédure DALO. Si la commission DALO vous a reconnu prioritaire, votre relogement doit normalement intervenir avant l’expulsion.

 

En cas d’impayés de loyer, les allocations logement (ALF, APL, ALS) sont suspendues. Mais lorsqu’il y a règlement à l’amiable avec le propriétaire, elles peuvent être maintenues si le locataire est de bonne foi (c’est à dire s’il ne tente pas de dissimuler des ressources et cherche à payer ses loyers). Les allocations sont alors directement versées au propriétaire pendant 6 mois. Cette demande doit être faite au plus vite auprès de la CAF à partir du seuil de deux mois d’impayés. Une fois ce seuil franchi, le propriétaire n’a plus que 3 mois pour la faire.

 

Si ce n’est pas déjà fait, il vous est conseillé de constituer un dossier de surendettement, qui vous permettra de rééchelonner vos dettes, trouver un accord avec votre propriétaire et, si vous respectez le plan proposé, cela bloquera toute mesure d’expulsion contre vous.

 

Tournez-vous en même temps vers des aides sociales pour le logement. Par exemple, vous pouvez solliciter une aide auprès du Fonds de Solidarité pour le Logement.

 

Que se passe-t-il une fois la procédure d’expulsion lancée ?

 

En l’absence d’arrangement entre votre propriétaire et vous, il existe deux procédures.

 

Soit le propriétaire saisit le juge pour demander la résiliation du contrat de bail et l'expulsion (en cas de versement d’APL, il ne peut le faire que deux mois après avoir prévenu l’organisme prestataire).

 

Le juge évalue alors si votre manquement est suffisamment grave et décide : soit d’accorder un délai de paiement (pouvant aller jusqu’à 2 ans) ; il vous faut alors le demander en rappelant la proposition écrite qui a été faite au propriétaire. Pour les baux conclus à compter du 27 mars 2014, les délais de paiement peuvent être accordés par le juge dans la limite de trois années - soit de réduire les taux d’intérêts ou de vous dispenser de payer les intérêts - soit la résiliation du contrat et l’expulsion.

 

Soit une clause de résiliation du bail est prévue dans le contrat de location, dite clause résolutoire. Le propriétaire doit alors saisir le juge pour demander à ce qu’elle soit appliquée. S’il choisit de faire jouer « la clause résolutoire », vous recevrez un commandement de payer qui vous sera remis par huissier et vous précisera la possibilité de saisir le Fonds de Solidarité pour le Logement (FSL). Vous avez alors un délai de 2 mois pour payer ou saisir le FSL. Si vous ne le faites pas, vous serez assigné par huissier à comparaître devant le juge d’instance. Vous pouvez également saisir à ce moment le juge des référés d’une demande de délai.

 

Attention : dans tous les cas, un propriétaire ne peut vous expulser que si une décision judiciaire le prévoit. Et ce même lorsque vous êtes dans un foyer d’hébergement. Vous devez recevoir une convocation au tribunal indiquant la date de l’audience au moins 2 mois avant celle-ci et 3 mois si vous êtes locataire HLM.

 

A noter : si votre propriétaire vous force à quitter les lieux sans être passé par la procédure normale, à l’aide de manœuvres, menaces, voies de fait ou contraintes, il est passible de trois ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende (C. Pénal, art. 226-4-2).

 

Quels sont les délais d’exécution de la décision d’expulsion ?

 

Seule une décision d’expulsion rédigée en des termes précis et contenant le mot « expulsion » peut être utilisée par le propriétaire. Une décision qui mettrait fin à la légalité de l’occupation des lieux ou une décision d’adjudication ne permettent pas l’expulsion.

 

Lorsqu’une décision d’expulsion a été prononcée, le propriétaire doit vous communiquer à chacun des époux locataires un rappel de la décision d’expulsion prononcée destinée à inciter à partir avant l’expulsion (il s’agit d'un « commandement d'avoir à quitter les lieux ». Ce document doit revêtir une forme particulière sous peine de nullité : précisée ici.

 

L'expulsion ne peut avoir lieu avant un délai de 2 mois à partir du commandement. Ce délai peut être raccourci par le juge ou prolongé, notamment pour les squatteurs et en cas d’expulsion pour situation de péril.

 

Si vous contestez avoir reçu ce document, c’est au propriétaire de prouver qu’il existe. Si le propriétaire ne parvient pas à prouver qu’il existe, les opérations d’expulsions sont déclarées nulles par le juge de l’exécution et tout se passe comme si le délai de 2 mois n’avait pas commencé à courir.

 

Que pouvez-vous négocier ?

 

A partir de la signification du commandement d’avoir à quitter les lieux, vous pouvez demander au Juge de l’exécution du Tribunal de Grande instance un délai qui ne peut excéder trois mois lorsque « l’expulsion aurait pour la personne concernée des conséquences d’une exceptionnelle dureté, notamment du fait de la période de l’année ». L’avocat n’est pas obligatoire mais il est recommandé d’en avoir un. Pour cela,  une demande d’aide juridictionnelle permettant la prise en charge des frais d’avocats peut être formée au Bureau des aides juridictionnelles (BAJ) du Tribunal de grande instance. Il est préférable d’avoir d’abord saisi le juge pour donner la date du jugement au BAJ et l’inciter à répondre à la demande avant cette date.

 

Si le relogement ne peut avoir lieu dans des conditions normales et au regard du droit au logement décent et indépendant, des délais renouvelables allant de 3 mois et dans une limite maximale de trois ans peuvent être accordés par le juge. Le juge va regarder l’âge, l’état de santé, la qualité de sinistré par faits de guerre, la situation de famille et de fortune du locataire et du propriétaire et surtout si vous avez fait des démarches pour vous reloger. Attention, si vous ne prouvez pas que vous avez essayé de vous reloger, le juge ne pourra pas vous octroyer de délai.

 

En cas de bail dans un HLM : vous pouvez demander de conclure un protocole d’accord avec le bailleur qui permet la suspension de la procédure.

 

Il vous faut adresser une lettre recommandée à votre bailleur avec copie au préfet. Le principe est alors de s’engager à payer le loyer dans les dates prévues par le bail et de rembourser une partie de votre dette chaque mois. A l’issue du délai prévu (maximum 2 ans), si les engagements sont respectés, un nouveau contrat de bail est conclu, vous mettant en sécurité car le bailleur ne pourra plus vous expulser sans obtenir une nouvelle décision de justice. A défaut de paiements, la procédure d’expulsion reprendra avec interruption du versement des APL et AL. Le protocole peut prévoir un accompagnement de gestion du budget par le fond de solidarité habitat ou l’obligation d’un suivi par un travailleur social.

 

Un modèle de lettre est disponible ici.

 

Pouvez-vous contester la décision d’expulsion ?

 

Si vous voulez contester un jugement d’expulsion, il faut faire appel. Pour cela, adressez-vous au bureau de l’aide juridictionnelle situé au Tribunal de Grande Instance situé dans la même ville que le tribunal ayant prononcé votre expulsion : vous pourrez bénéficier d’une prise en charge des frais de justice et des honoraires d’avocat. Mais il ne faut pas attendre la réponse du bureau d’aide juridictionnelle pour faire appel car les délais sont très courts. En cas de nécessité, il peut y avoir une admission provisoire à l’aide juridictionnelle.

 

A compter du jour où le jugement d’expulsion vous a été notifié, votre avocat, peut faire appel dans les 15 jours si c’est une ordonnance de référé et 1 mois si c’est un jugement. Il n’est pas toujours conseillé de faire appel car le juge d’appel peut être parfois plus sévère que le premier juge. De plus, la première décision n’est pas suspendue même si vous faites appel. Parfois, le jugement d’appel a lieu longtemps après l’expulsion. C’est pourquoi, si vous souhaitez faire appel, il est conseillé de demander au premier président de la Cour d’appel (juge des référés) de suspendre l’exécution de la décision de première instance si vous pouvez justifier de « conséquences manifestement excessives » qu’entraînerait l’exécution provisoire de cette décision.

 

Conditions à respecter pour mettre en œuvre une expulsion

 

Aucune expulsion ne peut intervenir entre le 1er novembre et le 31 mars sauf : s’il est prévu un relogement décent pour vous et votre famille - si les locaux, menaçant ruine, font l’objet d’un arrêté de péril par la mairie - si les personnes dont l’expulsion a été ordonnée occupent le local sans l’accord du propriétaire (squatteurs) - pour les étudiants ne répondant plus aux critères d’octroi de logements étudiants.

 

Si le juge écarte cette « trêve hivernale », il doit le préciser dans le jugement et expliquer sa décision. Sinon,  le jugement est illégal.

 

De même, aucune expulsion ne peut avoir lieu entre 21h et 6h du matin, et les dimanches et jours fériés.

 

Si l’huissier se présente chez vous

 

Si, à l’expiration du délai de 2 mois à partir du commandement de quitter les lieux, vous êtes resté dans les lieux, le propriétaire peut demander à un huissier de procéder à l’expulsion.

 

L’huissier se présente alors au logement pour vous demander de quitter les lieux.

 

Soit vous êtes présent dans les lieux et acceptez de laisser entrer l’huissier : il dresse alors un inventaire de vos biens meubles et vous demande de lui indiquer un lieu de dépôt et, à défaut, les laisse sur place ou vous indique un lieu où ils seront déposés à vos frais.

 

Soit vous êtes présent mais refusez de laisser entrer l’huissier : A ce stade, vous avez droit de refuser de quitter les lieux. L’huissier doit alors dresser un procès-verbal et demander l’intervention de la police au préfet. En aucun cas, il ne peut lui même vous contraindre à quitter les lieux ou utiliser des procédés d’intimidation. Sinon l’huissier commet une faute qui pourrait engager sa responsabilité et faire annuler l’expulsion. En principe, le préfet doit accorder le concours de la force publique mais lorsque cela peut avoir des conséquences désastreuses comme mettre une famille à la rue, ou une personne âgée, elle peut le refuser. En cas de refus de concours de la police, le propriétaire peut demander à être indemnisé auprès du tribunal administratif du ressort de l’immeuble, au titre des loyers non perçus.

 

Soit vous êtes absent de votre domicile le jour de l’intervention de l’huissier : L’huissier n’a pas le droit de rentrer dans le domicile. S’il le fait, c’est une violation de domicile passible de poursuites pénales. Il doit alors obtenir le concours de la force publique auprès du préfet, être accompagné d’une autorité de police (et d’un serrurier) pour entrer dans votre domicile, procéder à l’enlèvement de vos meubles et changer la serrure.

 

Le fait de vous forcer à quitter les lieux sans avoir obtenu le concours de la force publique est un délit pénal puni de 3 ans d’emprisonnement et 30.000 € d’amende (art. 226-4-2 du code pénal).

 

Remarque : si un occupant squatte des locaux depuis moins de 48h, il peut être expulsé par la police sans jugement.

 

Toutes ces formalités disparaissent en cas de réinstallation illégale sur les lieux de la personne expulsée.

 

Quelles sont les garanties pour vos meubles ?

 

Les papiers et documents de nature personnelle pourront être gardés ou seront placés sous scellés et gardés deux ans par l’huissier pour que vous puissiez venir les chercher. Ils bénéficient d’une protection particulière.

 

En revanche,  concernant les meubles qui auront été laissés sur place ou déposés en un lieu indiqué, vous avez un mois à compter du moment où le procès-verbal d’expulsion vous a été remis pour les reprendre. A défaut, vous devez vous rendre devant le juge à la date et l’heure précisées sur le procès-verbal. Le juge décidera alors du sort des meubles.

 

A quoi sert le procès-verbal d’expulsion remis par l’huissier ?

 

Le procès-verbal d’expulsion est un document écrit par l’huissier et qui vous est remis. Il est essentiel car il permet de vérifier que l’expulsion a  été régulièrement mise en œuvre. Il doit contenir toutes les mentions prévues par l’article R. 432-1 du Code des procédures civiles d’exécution. Si ce n’est pas le cas, l’expulsion est irrégulière, vous pourrez la contester devant le juge de l’exécution et obtenir des dommages et intérêts, voire la réintégration sur les lieux (très rare).

 

Le procès-verbal d’expulsion est aussi très important car il est la preuve que l’expulsion a eu lieu et permet donc d’obtenir une solution d’hébergement de la part des pouvoirs publics.

 

Enfin, il sert également de convocation devant le juge de l’exécution pour décider de l’avenir des meubles qui sont restés sur place ou ont été déposé dans un lieu approprié. Il vous informe du jour de l’heure et du juge compétent pour se prononcer dans l’hypothèse où vous n’auriez pas récupéré vos meubles dans le délai d’un mois.

 

Ce procès-verbal doit vous être remis en main propre lors de l’expulsion ou remis en main propre plus tard. Si vous n’avez pas d’adresse,  l’huissier doit tout faire pour vous le remettre. Cependant, s’il n’y arrive pas, il doit garder pendant trois mois le procès-verbal avec lui. Il vous est conseillé d’aller chercher le procès-verbal dans son étude.

 

Qui contacter pour vous aider ?

 

L’Agence Départementale pour l’Information sur le Logement (ADIL) – Cf. annuaire.

 

Le Tribunal d’Instance (TI). Cf. annuaire.

 

Le DAL (Droit Au Logement). Cf. annuaire des comités.

 

Allo Prévention Expulsion – Fondation Abbé Pierre pour le logement des défavorisé  0810.001.505