La Remédiation cognitive


Certaines maladies mentales entraînent des problèmes cognitifs : troubles de la concentration, de la mémoire, difficultés à organiser son discours et ses actions, troubles de la cognition sociale (fréquents par exemple dans les schizophrénies, et empêchant de comprendre les intentions et émotions d’autrui), etc.

 

Les personnes concernées ont parfois des troubles cognitifs tellement invalidants que ceux-ci entraînent des vraies difficultés dans leur vie quotidienne et dans leur possibilité de réinsertion.

 

La remédiation cognitive, qui fait partie du courant de l’éducabilité cognitive, est une thérapie qui répond à une logique de rééducation.

 

Elle est pratiquée par des professionnels soignants (psychologues, neuro-psychologues, médecins, infirmiers…) spécifiquement formés.

 

C’est un traitement rééducatif à visée thérapeutique destinée à des patients bien stabilisés, et qui propose des exercices, souvent ludiques, dont l’objectif est d’améliorer les déficiences cognitives. Certains de ces exercices, d’une durée moyenne (plusieurs dizaines de minutes) sont proposés via des logiciels, d’autres via des jeux de cartes, des photos, des vidéos, des jeux de rôles, des livres spécifiques…

 

Plusieurs programmes sont notamment disponibles pour les personnes souffrant de schizophrénies.

 

La remédiation cognitive peut s’effectuer – soit sur les fonctions cognitives déficitaires, de manière à les réentraîner, voire à les restaurer en partie - soit sur les fonctions cognitives préservées, de manière à développer des stratégies qui pourront pallier aux fonctions déficitaires (stratégie de compensation).

 

Dans le premier cas, les exercices pourront être répétés, permettant de travailler spécifiquement une fonction en particulier, pour la restaurer.

 

Dans le deuxième cas, le patient est encouragé à développer des stratégies personnelles, par exemple dans la manière de mémoriser des informations.

 

Les bénéfices de cette thérapie de remédiation cognitive va jouer sur plusieurs niveaux, va notamment permettre à la personne de pouvoir évoluer en terme de compétences sociales, et l’aider ainsi dans sa réinsertion.

 

Le professionnel soignant va d’abord établir un constat précis des fonctions cognitives du patient, va essayer de comprendre également au plus près les besoins et les attentes au quotidien, et va proposer ensuite un programme de rééducation personnalisée au plus près de l’usager.

 

La thérapie peut commencer ensuite, à un rythme qui peut être de plusieurs séances hebdomadaires, et ce, sur plusieurs semaines, voire plusieurs mois, les séances pouvant se faire en individuel ou en groupe, et étant souvent couplées d'exercices à faire à domicile.

 

Les exercices seront réajustés au fur et à mesure des progrès réalisés et des objectifs souhaités. Ils deviendront, au fur et à mesure, plus complexes.

 

Par ailleurs, plus la personne pourra utiliser dans sa vie quotidienne les fonctions cognitives repérées via les exercices, meilleure et plus rapide sera l’évolution. Le fait par exemple de devoir compenser au quotidien telle fonction cognitive parce qu’elle est plus qu’utile et/ou souhaitée va pousser le patient à développer des stratégies personnelles. Et à être d’autant plus acteur de la thérapie. Un amoureux de la lecture sera ainsi d’autant plus motivé à retrouver un bon niveau de concentration et/ou de mémorisation, pour pouvoir retrouver pratique et goût de la lecture.

 

La thérapie de remédiation cognitive s’inscrit également dans un parcours de soins global, et s’appuie généralement sur une équipe pluridisciplinaire, le neuropsychologue ou professionnel soignant dédié à cette thérapie travaillant rarement seul dans son coin. Cette approche globale va aussi permettre d’appréhender au plus près la situation et les attentes du patient, et de pouvoir lui proposer un projet thérapeutique personnalisé, et qui pourra proposer notamment plusieurs thérapies différentes et complémentaires.


Quelques exemples de programmes…


Le programme ToMRemed qui déclare avoir pour cible les capacités cognitives issues de la théorie de l’esprit (Theory of Mind) et plus particulièrement les problèmes de « cognition sociale », fréquents dans les schizophrénies, et qui entraînent des difficultés à attribuer des intentions à autrui. Le matériel est constitué de 10 courts extraits de films, mettant en scène 2 ou 3 interlocuteurs dans des situations de la vie quotidienne fréquentes et riches en échanges intentionnels. Chaque extrait est assorti de 2 ou 3 questions portant sur les intentions des personnes et de 5 hypothèses de réponses. Le programme comporte 10 séances d’une durée d’environ 1h30, composées chacune de deux temps bien distincts : des expériences de vie rapportées (travail sur une situation de la vie quotidienne dans laquelle un patient s’est senti en difficulté de communication et échanges au sein du groupe) et un extrait de film qui va servir de base à d’autres échanges. Le programme ToMRemed est généralement proposé à des petits groupes (3 à 6 patients) et animé par deux thérapeutes.



Le programme IPT (pour Integrated Psychological Treatment), créé en 1992 en Suisse et destiné à des schizophrènes, associe remédiation cognitive et entraînement des compétences sociales. Il propose six modules de complexité croissante, réalisés en petits groupes homogènes (dix personnes ayant une pathologie proche), avec deux séances hebdomadaires, sur une durée de 9 à 12 mois. Les premiers modules traitent des processus neurocognitifs (attention, mémoire, planification) tandis que les derniers concernent l’entraînement aux habiletés sociales. Les supports utilisés sont variés : jeux de cartes, exercices papier/crayon, projection d’images…

 

Le programme RECOS, lui aussi proposé aux schizophrènes ou apparentés, et adapté au profil cognitif de chaque personne, propose une thérapie intense mais brève (durée 14 semaines), avec 2 séances hebdomadaires en présence d’un thérapeute et 1 tâche à effectuer à domicile, en lien avec la vie quotidienne. Il est utilisé en Suisse romande et en France.

 

Le logiciel REHA-COM dont la particularité est qu’il n’est pas indispensable qu’un professionnel soignant soit présent, même si cela peut être utile qu’il accompagne le patient et qu’il crée un lien thérapeutique, a été élaboré par des autrichiens. Il se compose de 14 à 20 séances individuelles, à difficulté croissante, à raison de 2 séances de 40 minutes par semaine (2 modules d’entraînement par séance). Ce programme initialement destiné aux patients cérébro-lésés a été étendu à d’autres handicaps (schizophrénies…).

 

Le programme SCIT (Social Cognition and Interaction Training) dont l’objectif est de travailler les troubles de la cognition sociale et les biais de raisonnement, se pratique en groupe, sur une durée de plusieurs mois (20 à 24 séances d’une durée d’environ 1h30, dispensés à un rythme hebdomadaire et animées par deux thérapeutes).

 

Le programme Gaïa travaille également sur les troubles de cognition sociale et repose sur un entraînement des processus de traitement des informations faciales émotionnelles. Il se déroule sur 20 séances individuelles animées par un thérapeute formé. Il comprend 3 phases : exercices sur photos visant à catégoriser 3 émotions courantes (joie, colère et tristesse) – exercices informatisés présentant des situations virtuelles proches de la vie quotidienne (Gaïa, un personnage fictif, évoluant dans trois environnements (lieu de travail, pharmacie et famille) et rencontrant différentes personnes, les interactions étant présentées en gros plan) – et jeux de rôles en séance, tout ceci étant couplé avec des tâches à faire à domicile, pour favoriser la motivation du patient.

 

Le programme MCT est destiné à améliorer la « métacognition » (connaissance de ses propres pensées).

 

Le programme RC2S (Remédiation Cognitive de la Cognition Sociale) est lui aussi destiné aux personnes schizophrènes.